Je profite de la publication de l'article du Captain' sur "Le vieillissement de la population et l'explosion future des dettes publiques" pour apporter ma première contribution à ce site. Comme l'a dit le Captain', les pays développés vont faire face dans les années à venir au vieillissement de leur population (il en va en fait de même pour les pays en développement). Commençons donc par la théorie, avec un retour sur vos cours de collège / lycée de géographie...
Le vieillissement de la population est la conséquence de la diminution de la natalité et de l'augmentation de l'espérance de vie. La diminution de la natalité est un phénomène qui se déroule pendant la transition démographique. Cette dernière est définie par l'INED (Institut national d'études démographique) comme "le passage d'un régime traditionnel où la natalité et la mortalité sont élevées et s'équilibrent à peu près, à un régime où la natalité et la mortalité sont faibles et s'équilibrent également".
La transition démographique peut être divisée en quatre périodes : un période primitive, une période d'élévation, une période de décélération et une période post-transitionnelle. La première phase est caractérisée par des taux de mortalité et de natalité élevés. C'était le cas chez nous au 18ème siècle (ex : la mortalité infantile était de 250 morts pour 1000 naissances). Conséquence, il fallait faire beaucoup d'enfants pour les voir arriver à l'âge adulte. La natalité était donc importante, avec une fécondité de plus de 4 enfants par femme. Durant cette phase, le taux d'accroissement naturel (différence entre le taux de natalité et le taux de mortalité) est proche de 0, évoluant soit positivement lors des bonnes années (paix), soit négativement lors de mauvaises années (épidémies).
La deuxième phase est caractérisée par un effondrement du taux de mortalité et d'une natalité qui reste importante. La chute de la mortalité est la conséquence d'une meilleure hygiène, de l'assainissement des eaux usées, d'une alimentation diversifiée, l'arrivée massive de médicaments pour le cas des pays en développement Durant cette phase, le taux d'accroissement naturel augmente fortement (d'autant plus vite que la chute de la mortalité est importante).
La troisième phase est marquée par la diminution de la natalité. Cela va alors marquer une inflexion dans la courbe du taux d'accroissement qui commence alors à décroître (voir le graphique ci-dessous, le point d'inflexion mondial est en 1963). Durant cette phase, la mortalité poursuit sa diminution mais de manière moins significative. Comme on peut le voir sur l'illustration de la transition démographique, il y a un décalage entre la diminution de la mortalité et de la natalité. L'adaptation des comportements prend en effet du temps. Il ne faut d'ailleurs pas remonter très loin, même chez nous, pour retrouver des familles nombreuses, vos grands parents étant probablement issus de familles de 5-6 enfants, voire plus, alors que les familles actuelles se composent de 2 enfants en moyenne.
La dernière phase de la transition démographique est la période post-transitionnelle. Cette période est la plus complexe car il n'y a pas de schéma standard entre les différents pays, si ce n'est que les taux de mortalité et de natalité sont bas par rapport à la situation initiale. L'Italie par exemple a un indice de fécondité (nombre d'enfants par femme) de 1.4, la France de 2.08, la Belgique de 1.65, l'Allemagne de 1.41 (source : The World Factbook)... La fécondité dépend en effet des politiques (pro-natalistes ou pas), de la façon dont la société considère l'enfant par rapport au mariage, par rapport au travail
L'indice de fécondité renseigne sur l'évolution future de la population du pays puisqu'il donne le nombre d'enfants moyen par femme. Il faut savoir que le seuil de renouvellement des générations , qui est le nombre moyen d'enfants par femme nécessaire pour que chaque génération en engendre une suivante de même effectif (ou le nombre d'enfants que doivent faire 100 femmes pour y avoir 100 femmes en âge de procréer lors de la génération suivante), est au minimum de 2,05 enfants par femme. Parce que pour 105 garçons il naît 100 filles, soit 205 enfants pour 100 femmes. Les seuils réels sont supérieurs à ce minimum en raison de la mortalité entre la naissance et l'âge de procréation. Dans les pays développés, cette mortalité juvénile est devenue très faible et le seuil de renouvellement est de l'ordre de 2,10 enfants par femme (INED).
La différence de fécondité entre la France et l'Allemagne parait minime (2.08 1.4 = 0,608) mais à long terme, la conséquence sur la population est énorme. Comme le souligne Le Point dans un article publié en mars, si la France (65 millions d'habitants) et l'Allemagne (82 millions) conservent leur taux actuel, la population française dépassera celle de son voisin d'outre Rhin d'ici 2055. C'est ce que Gérard-François Dumont appelle l'effet tire à l'arc : une différence de quelques millimètres avec l'arc et vous manquez la cible de plusieurs centimètres.
Le "non-renouvellement" des générations des pays développés est la cause du vieillissement de la population. Les pyramides des âges s'inversent dans la majorité des pays développés. L'exemple le plus marquant est le Japon, qui devrait perdre jusqu'à 30% de sa population d'ici 2060. En 2050, il y aura presqu'un actif pour un retraité, comme quoi la situation française n'est pas la pire !
Conclusion: Tous les pays du monde sans exception devraient connaitre un vieillissement de leur population. Si des situations sont plus préoccupantes comme celle du Japon, les pays développés ont au moins la chance d'avoir un système de cotisations sociales qui fonctionne. La majorité des pays en développement, et principalement la Chine qui devra faire face aux conséquences de sa politique de l'enfant unique, n'auront pas la chance d'avoir ce genre de système de redistribution. Malheureusement, beaucoup de ces pays seront "vieux" avant d'être "riches". Quant à nous, la solution pour payer les retraites en évitant de s'endetter, sera soit de travailler plus longtemps, soit de mettre en place des politiques d'immigrations pour augmenter le nombre d'actifs par rapport au nombre de retraités, soit de favoriser des politiques natalistes (augmenter les allocations, le nombre de crèches, les congés maternité, ) mais l'inertie est énorme et il faudra 20 ans à ces bébés pour entrer dans la vie active et remplacer ainsi les retraités.