Le Captain' étant trop occupé à siroter des mojitos en Colombie pour deux semaines, c'est aujourd'hui Jean-Yves Archer, énarque (promotion Leonard de Vinci) et spécialiste du conseil en rapprochement d'entreprises au sein du cabinet Archer, qui prend la relève sur Captain Economics.
Si vous interrogez un chef d'entreprise même assez pointu en économie, il n'est pas certain que le concept d'externalités ne lui fasse tendre l'oreille ou émettre une définition assez précise. Ce concept est vu rapidement pendant les études et après, bien peu s'en préoccupent alors qu'il est une des clefs de notre redressement productif pour utiliser l'intitulé du ministère conduit par Monsieur Arnaud Montebourg.
Une externalité est définie comme tout effet créé par autrui lorsqu'il procure à un agent économique un avantage généralement gratuit. On cite traditionnellement le petit restaurant qui voit sa clientèle augmenter suite à l'arrivée du siège social d'une grande entreprise. Plus significativement, il y a externalité positive lorsqu'une ligne de TGV permet aux voyageurs de gagner du temps, au foncier entourant les gares de prendre de la valeur et aux entreprises de pouvoir attirer du personnel de qualité ( que l'éloignement initial rebutait ).
Une externalité est donc une sorte de bonus auquel l'agent économique bénéficiaire n'a pas contribué. Ce concept traduit concrètement l'interdépendance des différents acteurs économiques : ainsi, on a souvent utilisé l'exemple de l'apiculteur situé près d'un horticulteur. Mais qui dit bonus, peut dire malus : on parle alors de déséconomie externe ou encore d'externalités négatives. Il s'agit des cas où un agent économique vous contraint à engager des dépenses non prévues. L'Etat est alors cité dans le cas de la construction du boulevard périphérique qui a affecté la valeur des immeubles qui en sont proches mais aussi et surtout la santé des riverains de surcroît souvent condamnés à payer des travaux d'isolation.
De manière plus insidieuse, une externalité négative réside dans l'allongement tendanciel du temps de trajet domicile-travail qui n'a jamais pu être intégré dans la notion de pénibilité du travail (même au-delà de trois heures par jour) lors de la dernière réforme des retraites. De même certains économistes considèrent une mobilité professionnelle subie comme une externalité négative. De nos jours, ce sont les multiples foyers de pollution qui sont usuellement désignés comme des déséconomies externes (embouteillages, déchetteries sauvages, etc).
Au plan théorique, l'existence incontestable d'externalités trouble le raisonnement de l'optimum de Pareto puisqu'elles peuvent empêcher une allocation optimale des ressources. Au plan concret, on voit bien que si un maire d'une commune limitrophe à un centre de recherches biotechnologiques sait construire des lotissements, on déclenche un processus plus que collectivement gagnant. C'est à une réflexion, reposant sur les outils de l'aménagement du territoire et de son attractivité internationale, que nous appelons le ministère Montebourg. Développer les externalités positives, c'est servir le dynamisme de notre compétitivité.
Au demeurant, nous sommes surpris par le peu de lien qui existe dans la littérature entre externalités et facteur résiduel. Rappelons que le facteur résiduel est la partie « inexpliquée » de la croissance. A côté de la combinaison des facteurs de production que sont respectivement le capital et le travail, les économistes Carré, Dubois et Edmond Malinvaud (longtemps à la tête de l'I.N.S.E.E) en utilisant la fonction de Cobb-Douglas ont réussi à démontrer dans les années 70 que sur un taux de croissance de 5% (chiffre qui fait rêver de nos jours...) le facteur travail a contribué à hauteur de 1%, le facteur capital à hauteur de 1,5%. Ainsi, le facteur mystère dit résiduel a pesé sur 2,5% soit la moitié du taux nominal de croissance.
Quand bien même leur calcul serait un peu erroné ce qui n'a jamais été démontré cela prouve l'importance des autres éléments hors travail et capital comme la formation professionnelle du personnel, l'impact d'une innovation maîtrisée ou la politique de grappes d'innovation (voir www.franceclusters.fr). Là encore, on touche clairement aux ingrédients du redressement productif.
Conclusion: La matière est vaste mais une conclusion s'impose : si nous voulons que notre Nation ne voit pas ses salariés trop souffrir des temps sombres (prévisions de croissance pour 2013), il faut engager des dynamiques de réflexion sur les externalités en gardant à l'esprit que c'est ainsi que l'on alimente favorablement le facteur résiduel donc une part de la croissance qui nous fait défaut et demeure le pivot et la solution à beaucoup de nos défis à commencer par la tenue des finances publiques.